Bx Alain de Solminihac

Biographie

Alain de Solminihac est né le 25 novembre 1593 au Château de Belet, en Dordogne, d’une famille catholique de petite noblesse rurale.

Il songeait à devenir Chevalier de Malte, vocation à laquelle le préparait son éducation, quand les circonstances firent de lui, à l’âge vingt ans, un abbé de Chancelade, Abbaye de Chanoines réguliers de Saint Augustin toute proche de Périgueux (5 septembre 1614). Les bâtiments étaient en ruine. La Communauté se trouvait  réduite à trois religieux. Alain vit, dans cette désignation, un signe de Dieu, se consacra à Lui entièrement et décida de réformer cette Maison. La France connaissait alors un renouveau religieux avec l’éclosion de l’école française de spiritualité dans le sillage du concile de Trente.

Afin de se préparer à cette tâche, Alain prit l’habit religieux, s’exerça à l’oraison mentale et fit sa profession le 28 juillet 1616. Il devint prêtre le 22 septembre 1618.

Après son ordination, il partit pour Paris afin d’y compléter sa formation intellectuelle et spirituelle et pour enquêter sur la manière dont s’opérait la réforme des Chanoines réguliers, sous la direction du Cardinal de La Rochefoucauld et du Père Charles Faure. Il resta quatre ans à Paris, suivant les cours de la Sorbonne où il subit l’influence d’André Duval. Il fréquenta les milieux spirituels : il put voir notamment, à plusieurs reprises, saint François de Sales lors du séjour que fit celui-ci dans la capitale en 1619. Il fréquenta aussi le Cardinal de la Rochefoucauld et Charles Faure. Enfin il fit les Grands Exercices Spirituels de Saint Ignace sous la direction du jésuite Antoine Le Gaudiery, célèbre pour son talent à diriger les âmes. Il suivit, jusqu’à la mort, les résolutions qu’il prit durant cette retraite. En octobre 1622, il était de retour à Chancelade.

Pour comprendre Alain de Solminihac, il faut toujours se reporter à ce séjour qui orienta définitivement son esprit. C’est là qu’il entra vraiment en relation avec les animateurs de la Réforme Catholique en France et qu’il reçut la formation qui lui manquait auparavant.

Dès son retour à Chancelade, il se préoccupa de recevoir la bénédiction abbatiale. Elle lui fut conférée le jour de l’Épiphanie par l’Évêque de Périgueux, Monseigneur de la Béraudière, qui l’avait déjà ordonné prêtre.

Il commença immédiatement son œuvre de réformateur. Il reconstruisit l’église et les bâtiments claustraux tels que nous les voyons aujourd’hui. Il reconstitua la communauté et en treize ans, il reçut cinquante nouveaux chanoines. Il leur donna une formation très profonde. Il leur donna  une direction spirituelle collationnée sous le nom d’Avis.

C’est un texte qui mérite de prendre place parmi les meilleurs ouvrages spirituels du temps. Il les orienta en même temps vers l’apostolat, conformément à leur vocation. Chancelade assura désormais et l’office public et le service pastoral. En quelques années, l’Abbaye jouissait d’une réputation bien établie. Il en sera ainsi jusqu’à la Révolution. Le succès d’Alain de Solminihac fut impressionnant et lui valut une réputation étendue. Si la réforme française des Chanoines réguliers avait tourné autrement, l’Abbé de Chancelade aurait pu se trouver placé à la tête d’une vaste Congrégation de Chanoines réguliers répandue à partir de Chancelade dans le sud et l’ouest du royaume.

Cette réputation attira très vite sur lui l’attention du roi Louis XIII, du Cardinal de Richelieu et du Pape Urbain VIII. Comme il fallait, à tout prix, trouver des évêques en un temps où la réforme de l’Église était à l’ordre du jour, on pensa à lui. On songea d’abord à lui confier Lavaur qu’il refusa, souhaitant se consacrer au développement de la réforme de Chancelade. Il ne put se dérober quand il fut prévenu de sa nomination à Cahors. C’était alors un des évêchés les plus importants de France. Il était dans une triste situation et il fallait, pour le reprendre en main, un homme doué de beaucoup d’énergie. En acceptant cette charge, il mit une seule condition : pouvoir conserver l’Abbatiat de Chancelade afin d’y implanter plus solidement la réforme, déjà étendue aux Abbayes de Sablonceaux, près de Saintes, de la Couronne, près d’Angoulême et au prieuré Saint-Gérald à Limoges. Malgré les difficultés, il conserva sa charge d’Abbé  jusqu’à l’élection de son successeur, Jean Garat, qui entra en fonction en 1658.

 

En attendant de recevoir les bulles pontificales, Alain de Solminihac envisagea l’ensemble de ses nouveaux devoirs dans le Pontificat. Il vit les traités concernant l’évêque, qui étaient nombreux. Il étudia les décrets du concile de Trente. Il s’imprégna de la vie de saint Charles Borromée et des actes de l’Église de Milan. Il lut aussi les annales de Baronius et chercha à voir comment agissaient les évêques de l’Église primitive. Enfin, il reprit l’enseignement de saint Augustin sur la vie commune des clercs et organisa sa maison épiscopale en conséquence. De cette étude de plusieurs mois, complétée par des conversations et des correspondances avec des évêques très estimés, sortit un plan de vie épiscopale très précis : vie commune de l’évêque avec un groupe de Chanoines réguliers, spiritualité puisée aux sources des premiers siècles chrétiens ; application du concile de Trente et implantation, à Cahors, des institutions milanaises. C’étaient là les idées des grands réformateurs qu’il avait rencontrés à Paris.

Alain de Solminihac était tout à cette préparation quand il reçut ses bulles. Dans l’ancienne France, le sacre des évêques avait lieu généralement à Paris. Il suivit la coutume. Il fit une retraite d’un mois chez les Chartreux. La cérémonie se déroula le 27 septembre 1637. Elle eut lieu en l’église de l’Abbaye des Chanoines réguliers de Sainte Geneviève. L’ordination épiscopale lui fut conféré par l’Archevêque de Toulouse, Charles de Montchal, assisté des évêques de Senlis : Nicolas Sanguin, et de Meaux : Dominique Séguier. La cérémonie terminée, il se retira encore à la Chartreuse, puis à l’Abbaye de Chancelade.

Il acheva de mettre la main aux derniers préparatifs de son entrée dans le diocèse qu’il avait  mission de gouverner et prit ses dispositions pour la direction de l’Abbaye de Chancelade. Il arriva en Quercy début février 1638 et s’installa au Château de Mercuès, résidence des évêques de Cahors. La situation du diocèse était difficile. Il commença son œuvre en convoquant un synode qui eut lieu le 21 avril, suivi d’une série régulière jusqu’à sa mort.

Le synode achevé et les premiers règlements adoptés, il commença sa visite pastorale. Celle-ci ne devait finir qu’avec sa vie. Il lança aussi des missions paroissiales ; il organisa un Séminaire qu’il confia aux Lazaristes de saint Vincent de Paul, son ami ; il réorganisa les structures diocésaines ; suscita des conférences ecclésiastiques ; mit sur pied des œuvres de charité ; encouragea la dévotion au Saint Sacrement ; poussa à la piété mariale en manifestant son attachement pour Rocamadour ; fonda des hôpitaux et des orphelinats ; soutint l’instruction populaire. En même temps, il tint tête à toutes les oppositions, se montrant - en toute circonstances -  homme de courage. On le vit bien dans la manière avec laquelle il lutta contre les duels, un des fléaux du Quercy. On le vit aussi dans la manière dont il se comporta durant les troubles de la Fronde comme devant la révolte d’une partie de son clergé. Il fut aussi homme de fermeté quand il dut prendre parti devant les problèmes doctrinaux de son temps, en étroite union avec le Saint-Siège : gallicanisme, jansénisme, morale relâchée et surtout lutte contre les protestants qui fut l’un des axes  majeurs de son action.

Le sommet de cette action apostolique fut atteint lors du Jubilé accordé par le Pape Alexandre VII de 1657 à 1658.

Épuisé par son activité et par ses austérités, il mourut au Château de Mercuès le 31 décembre 1659. Il fut inhumé dans l’église des Chanoines réguliers de Cahors.

Cette mort fut un deuil public. La réputation de l’évêque se répandit. Il y eut de nombreux miracles et l’enthousiasme populaire fut tel qu’on envisagea de proclamer Alain bienheureux.

Ci-contre : sépulture d’Alain de Solminihac dans la cathédrale de Cahors